
APERÇU GÉNÉRAL
Zarqa, ville industrielle et deuxième ville jordanienne en termes de densité démographique, abrite des communautés diverses et est confrontée à une multitude de défis locaux. Toutefois, les communautés musulmane et chrétienne de la ville y ont cohabité pacifiquement depuis le début du XXe siècle. La ville abrite également le camp Al Azraq, deuxième plus grand camp de réfugiés syriens, dont le nombre y atteint les 36 605 environ selon l’UNHCR (le Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies).[1] Entre 2010 et 2015, Zarqa a assisté à une explosion du nombre de mariages des enfants, la plaçant ainsi au deuxième rang en la matière en Jordanie, à hauteur de 18,8% de mariages précoces.[2]
En 1993, Zarqa a vécu son premier attentat, perpétré par le groupe extrémiste islamiste Jaysh Mohammad, qui a pris pour cible le cinéma Zahran.[3] La ville souffre depuis d’être associée à l’image du djihadiste d’Al-Qaïda, Abou Mos’ab Al-Zarqawi. En raison du fort taux de chômage que connaît la ville, les jeunes vulnérables de Zarqa souffrent souvent du stéréotype de jeunes oisifs, désabusés et fauteurs de trouble en puissance. Les groupes de jeunes vulnérables de la ville ont en effet présenté un risque de recrutement, d’abord par Al-Qaïda, puis, plus récemment, de la part de Daech.
Menée par le réseau Strong Cities, la création du RPC de Zarqa est un exemple d’initiative née sur le terrain, qui répond aux problèmes de la ville en s’engageant dans la prévention de l’extrémisme violent (PEV). Ce RPC est investi dans la conception et la mise en place d’une stratégie de PEV locale concrète et met actuellement au point un manuel de politiques locales de PEV propre à Zarqa.
Zarqa abrite également la troisième université de Jordanie, l’Université Hachémite.
LE CONTEXTE NATIONAL
Dans une région qui connait un conflit et des remous politiques continus depuis un long moment, la Jordanie a constitué à plusieurs reprises un asile sûr pour les réfugiés des pays voisins, comme la Palestine, l’Irak et la Syrie. La Jordanie abrite la plus grande diaspora palestinienne et les communautés de réfugiés les plus importantes du Moyen-Orient, avec plus de deux millions de réfugiés inscrits à UNRWA (l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient). Suite à l’invasion de l’Irak menée par les Etats-Unis en 2003, les Irakiens fuyant le conflit se sont installés en Jordanie, notamment dans sa capitale, Amman. En 2012, le camp de réfugiés de Zaatari a vu le jour et est devenu, entre-temps, le plus grand camp de réfugiés syriens du monde.
Le conflit dans les pays environnants a exacerbé le risque de terrorisme dans les villes Jordaniennes. En novembre 2005, la filiale irakienne d’Al-Qaïda a organisé une attaque ciblant trois hôtels à Amman dans une série d’attentats-suicide coordonnés qui ont coûté la vie à plus de 55 personnes.[4] Plus récemment, Daech a pris en otage et exécuté un pilote de l’armée de l’air royale Jordanienne, le lieutenant Muadh Al-Kassasbeh, le brûlant vif, enfermé dans une cage.[5] L’incident a provoqué une onde de choc qui a secoué la Jordanie et le monde entier et incité la Royal Jordanian Air Force à lancer une contre-offensive, l’« Opération martyre Muath », contre Daech. [6] Fin 2016, Daech a également attaqué Karak, ville membre du réseau Strong Cities.[7] L’attentat a coûté la vie à plus d’une dizaine de personnes.[8]
Récemment aussi, la Jordanie a assisté à une série d’actes de violence survenus dans les campus universitaires, souvent liés à des tensions tribales. En 2013, un de ces incidents a causé le décès d’un étudiant âgé de 21 ans à l’université de Mu’tah, à Karak.
En janvier 2016, Ban-Ki Moon, l’ancien Secrétaire général des Nations Unies, a annoncé le lancement du Plan d’action de prévention de l’extrémisme violent des Nations unies qui incite tous les pays du monde à mettre en place un Plan d’action national (PAN) en la matière. La Jordanie met actuellement au point son Plan d’action national de PEV, sous la houlette de présidence du Conseil des ministres.

LE CONTEXTE LOCAL
En 2016, le réseau Strong Cities a lancé 6 réseaux de prévention communautaire (RPC) au Liban et en Jordanie. Les RPC, qui travaillent au niveau municipal, s’efforcent de créer des liens et de favoriser la communication entre la municipalité et les OSC (organisations de la société civile) locales, les ONG sur place et d’autres intervenants qui s’intéressent à la PEV : enseignants, travailleurs sociaux et responsables religieux. Le modèle de RPC du SCN est taillé sur mesure pour épouser les besoins de chaque ville et vise à gérer les problèmes que les membres du réseau considèrent comme prioritaires pour soutenir les efforts de PEV locaux. Les intervenants locaux connaissent mieux que quiconque leur contexte local et sont les plus à même d’affronter ses défis.
A Zarqa, le RPC a choisi d’axer ses efforts sur l’éducation et la culture. Le RPC local est constitué de 19 membres provenant d’horizons professionnels différents, notamment des organisations de la société civile, des avocats et des créatifs et est soutenu par la Mairie du Grand Zarqa, qui s’implique activement dans les événements organisés. L’interface du réseau et sa communication sont assurés par le Point de contact du RPC, Mohammed Al-Zawahreh.
INITIATIVES PRINCIPALES
Le 8 mai 2018, Zarqa a officiellement lancé son RPC. Conscient de l’importance d’une présence forte sur internet, le RPC de Zarqa a procédé au lancement officiel de son réseau sur les différentes plateformes de réseaux sociaux, afin de présenter ses axes de PEV à la communauté locale et la sensibiliser à ce sujet.
« La PEV à travers l’art » a longuement fait ses preuves en tant qu’approche communautaire efficace. Soutenue par la mairie du Grand Zarqa, le RPC de la ville a organisé une journée consacrée à l’art et à la culture ouverte au grand public. L’événement a permis de présenter des livres et un théâtre interactif dédiés à la PEV et une galerie d’art exposant le travail d’artistes locaux.
Le RPC de Zarqa élabore actuellement son propre manuel local de PEV, intitulé Le manuel des politiques locales de PEV. Le RPC a engagé un consultant local pour concevoir le manuel et dispenser des formations de PEV localisée s’appuyant sur le contenu du manuel. Ce document fait office de mini-plan d’action et explique comment les ONG et les intervenants locaux pourraient intégrer les politiques de PEV à leurs initiatives communautaires locales.
[1] https://www.reuters.com/article/us-Jordanie-refugees-energy-idUSKCN18D27V
https://reliefweb.int/sites/reliefweb.int/files/resources/61996.pdf
[2]https://sharenetJordanie.org.jo/sites/default/files/A%20Study%20On%20Child%20Marriage%20in%20Jordanie%202017.pdf
[3] Speckhard, A. The Jihad in Jordan: Drivers of Radicalization into Violent Extremism in Jordan Article · March 2017.
[4]https://www.nytimes.com/2005/11/10/world/middleeast/3-hotels-bombed-in-Jordanie-at-least-57-die.html
[5] https://www.bbc.com/news/world-middle-east-31121160
[6]http://www.Jordanietimes.com/news/local/armed-forces-launches-operation-martyr-muath%E2%80%99
[7]https://www.nytimes.com/2016/12/20/world/middleeast/Jordanie-attack-isis-karak.html
[8] Ibid